Sœur Marie-Thérèse, engagée avec le Secours catholique, au service de personnes blessées dans leur dignité, est ici le témoin heureux du chemin parcouru par Paulette. « Tout homme est une histoire sacrée, l’homme est à l’image de Dieu ». C’est bien cela qui m’est revenu en écoutant l’histoire de Paulette, 70 ans environ qui s’émerveille souvent devant la nature, le beau, et chose importante pour elle, le « bien manger ». Mais qui est-elle donc ?
Paulette est la 9ème enfant d’une famille qui a connu la guerre, les privations, la pauvreté, un père revenant d’un camp de travail en Alsace et dont la première des préoccupations est de boire, sans doute pour oublier. Elle est partie de la maison dès qu’elle l’a pu et s’est retrouvée un beau jour entrainée vers la région parisienne avec un garçon du pays. Ce fut l’époque de la liberté, le bonheur de s’éloigner du vécu familial. Mais tout cela fut très éphémère. La vie devient toujours plus difficile, le mari s’est mis à boire lui aussi. La situation se dégrade de plus en plus. L’homme ne supporte pas ses enfants. Il est violent. Les enfants doivent être placés, l’un chez une grand-mère, les autres dans des établissements. Paulette a mal, très mal au souvenir de tout cela et ne peut dire que : « l’alcool le rendait fou. Il ne savait plus ce qu’il faisait. »
Après des années de souffrance physique et morale Paulette se retrouve seule avec ses enfants qui lui en veulent d’avoir maintenu cette situation. Elle va alors descendre encore plus bas dans la détresse ; chacun de ses enfants lui tourne le dos. Elle a voulu refaire sa vie. Mais de nouveau ce fut l’échec.
Paulette est fille d’une ville de campagne. Elle aime la nature mais vit depuis plus de 45 ans avec le béton : béton dans la ville, béton aussi dans son cœur. Un jour, pourtant, elle pousse la porte du secours catholique. Là elle trouve la joie de parler avec d’autres personnes, comme elle, qui ne la jugent pas, ne lui demandent rien, l’accueillent comme elle est, avec son poids de vie qui est lourd. Alors, courageusement elle se reconstruit grâce à l’aide des autres rencontrés au Secours Catholique. On lui fait confiance. Elle peut « relever la tête. » Aujourd’hui Paulette accueille, monte des projets avec des membres de l’équipe, prend soin de ceux qui en ont le plus besoin, attentive aux uns et aux autres. Elle n’a plus peur du regard des autres
Il y a quelques temps, après bien des hésitations, Paulette est allée à Lourdes avec le Secours Catholique. Pour elle ce fut « magique ». La nature si belle, les montagnes devant lesquelles elle reste en admiration, les fleurs, l’odeur de la terre. Elle fait mention d’une grande paix intérieure en elle. Cette communion avec la nature c’est comme un grand souffle. A Lourdes elle a la possibilité d’aller aux piscines, lieu où elle s’est sentie réellement lavée, purifiée de tout ce qu’elle avait vécu.
Le chemin est encore long pour pardonner, se faire pardonner, mais dans son cœur Paulette sait qu’elle peut vivre quelque chose d’une certaine harmonie avec son passé, son présent et son avenir dont elle perçoit une petite lumière.
Elle sait aussi que le bonheur, elle peut le demander. Aujourd’hui elle a du prix aux yeux des autres, et de Quelqu’un qu’elle n’ose pas encore nommer, mais qui est dans sa vie et lui permet de rester « debout ».
Oui, Père, transforme en consolations nos épreuves,
Tous ces moments, ces années marquées par la souffrance
Que ta tendresse de Père nous enveloppe !
Donne consistance à notre vie,
Au matin rassasie nous de ta tendresse
Et nous crierons de joie de nous savoir aimés
(Du psaume 90)
Transmis par sœur Marie Thérèse Charrier